"Dieu gaulois aux bois de cerf, dont on ne sait à peu près rien aujourd'hui. Certains supposent qu'il aurait peut-être une connexion avec la chasse, la fertilité, la forêt et les espaces boisés."
Je paraphrase, mais c'est à peu près ça qui se trouvait sous le nom de Cernunnos dans le petit dictionnaire des mythologies du monde que je traînais partout avec moi quand j'avais 13 ans. Là où d'autres divinités avaient des entrées beaucoup plus fouillées, parfois s'étalant sur plusieurs pages (Zeus entre autres, Isis, Freya, Shiva, Amaterasu, etc.), pour lui c'était essentiellement un nom, la mention d'un seul attribut, deux lignes de spéculation, et l'immensité d'une page blanche.
Mon flirt avec la religion wiccane s'étant fait entre 12 et 15 ans par le biais des bouquins d'Eric Pier Sperandio (le Scott Cunningham québécois), qui nommait la déesse mais parlait à peine du dieu, je n'ai appris qu'une dizaine d'années plus tard que c'était l'un des noms rassemblés sous le manteau syncrétique du Dieu Cornu. J'ai été assez perplexe car "Cernunnos" et "le Dieu Cornu" me reflétaient des couleurs synesthésiques complètement différentes, mais autrement l'impact a été assez minime. À ce moment-là, j'étais ailleurs.
Quand j'en suis revenu à ce nom après être passé par un grand cercle de la vie, je ne savais pas où trouver l'information que je cherchais.J'ai commencé sur les blogs païens, les grands noms de la blogosphère anglophone qui ont une dévotion à Cernunnos et écrivent sur lui : John Beckett, Jason Mankey, Thumper Forge. En plus d'articles de blog intéressants, j'y ai trouvé deux anthologies à vocation dévotionnelle, Hoofprints in the Wildwood centrée sur le Dieu Cornu mais avec tout plein de textes spécifiques à Cernunnos, et The Book of Cernunnos qui rassemble des textes sur Cernunnos uniquement, écrits par des gens aux croyances et pratiques très différentes.
À peu près en même temps je suis tombé sur le mouvement reconstructionniste gaulois, ou en tout cas son mouvement anglophone sur les réseaux sociaux qui possède lui aussi des grands noms : Phyllis Fray Bober, une académicienne dont l'une des publications des années 50 est séminale au mouvement, et le pratiquant Ceisiwr Serith, qui sous le nom David Fickett-Wilbar a publié un article qui fait encore fureur aujourd'hui et dont on peut trouver un premier jet ici et un résumé vidéo là.
Tous ces gens ont des points de vue, des opinions, et des références personnelles qui sont complètement différentes et parfois vont jusqu'à se contredire, y compris au sein d'une même anthologie. Ça, ça me plaît énormément. Le monde me semble plus large, plus complexe et fouillé quand il y a une multitude de voix qui s'expriment, sur lesquelles former son discernement.
Mais sinon j'ai aussi découvert que les reconstructionnistes n'aimaient pas les wiccans et ça, ça me plaît beaucoup moins. D'un côté je peux comprendre que la religion wiccane (dont le dogme est bourré d'erreurs historiques) puisse être une insulte pour un Néo-Gaulois dont la pratique toute entière vise à reproduire les pratiques gauloises exactement telles qu'elles l'étaient. De l'autre, je suis sensible au mépris qui dégouline partout sur les sources de lecture recommandées par les reconstructionnistes, surtout qu'il est très souvent accompagné d'une sorte de certitude hautaine qui avance des théories comme si elles étaient des faits.Parce que c'est bien ça le souci avec Cernunnos : il n'y a aucune certitude.
Personnellement c'est un sujet sur lequel je préfère concilier. Sans exagération, il y a des centaines de milliers de personnes qui lui vouent un culte tout autour de la terre. Un bon nombre d'entre elles ont une expérience de lui qui est aux antipodes de la mienne. Est-ce que l'un de nous devrait remettre son expérience en question, simplement parce qu'on n'a pas été témoin de la même facette que l'autre ? Bien sûr que non. Il y a des aspects de moi qui s'expriment avec certaines personnes et pas avec d'autres, je ne vois pas pourquoi ce serait différent parce qu'il s'agit d'un dieu.
J'aime croire que chaque personne qui crie vers lui avec dévotion a quelque chose à m'apprendre sur sa nature.
Voilà où j'en suis. Je n'ai pas encore vraiment pris le temps de formuler mes propres théories, même si à force j'ai bien quelques opinions. J'ai entrepris un travail de lectures et de collection de données l'été dernier mais je n'en suis encore qu'au tout début de mes recherches. Et puis il ne faut pas oublier que tout ça, c'est du travail de tête, de la réflexion abstraite. Ma pratique spirituelle, je la nourris de mes lectures mais elle se vit ailleurs.Pour l'instant je lis tranquillement l'énorme monogramme de Daniel Gricourt et Dominique Hollard, "Cernunnos, le dioscure sauvage", dont on peut voir ici une partie de la table des matières et qui a été résumé et commenté (en anglais) là. Je n'en suis environ qu'au tiers, c'est un gros bouquin, mais jusqu'ici ça me semble original et bien documenté. Il y a bien un détail ou deux sur lesquels je tique mais dans l'ensemble je trouve ça convainquant.
Ça me travaille, ce sujet. J'y reviendrai.
Côté thé, j'ai reçu la commande Kancha de la semaine dernière. Elle est arrivée beaucoup plus vite que prévu, j'ai hâte que tout ça s'acclimate et de pouvoir y goûter. En attendant comme on peut voir sur cette photo j'aurai un peu de lecture dont je viendrai certainement reparler ici...
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