Beaucoup de plaisir avec mes sheng cette semaine. Les feuilles se sont bien remises du passage à la saison froide et me font des liqueurs souples, sucrées, charpentées, parfumées... Je les déguste comme un égoïste, sans les partager, car j'utilise ce temps personnel sur d'autres sujets de réflexion. Certains ne conviennent pas au domaine public. D'autres, c'est simplement que je n'ai pas encore poussé ma réflexion personnelle assez loin pour considérer en faire un article de blog. Le silence me fait du bien.
L'une des choses qui me trotte en tête a trait à mon expérience avortée de participer au défi d'écriture de novembre (autrefois appelé NaNoWriMo, maintenant repris sous le nom NovNov). J'ai du mal à entrer dans la peau de mon personnage principal. C'est un jeune homme de 20 ans un peu timide, un peu sensible, dont les ambitions sont simples jusqu'à ce que l'histoire lui en donne des nouvelles. Ses chapitres devraient rayonner de vie, là c'est aussi mort qu'un poisson pêché la veille.Ce n'est pas irréparable, mais je ne suis pas encore sûr de la bonne marche à suivre. Il ne manque ni de complexité, ni de cohérence interne, je ne sens pas le besoin de le remplacer par un meilleur personnage. C'est plutôt qu'il y a quelque chose chez lui qui ne m'est pas encore naturel. Ça fait coincer la transmission. En ce moment, j'écris au présent et à la troisième personne. Peut-être qu'il faudrait revenir à l'imparfait, ou alors lui donner la parole à la première personne et me laisser surprendre par ce qu'il a à dire. Peut-être que je devrais même changer de langue, écrire mon premier jet en français.
Peut-être que le problème se situe ailleurs, dans ma capacité à vivre sans engourdir l'expérience, à me fondre dans la peau d'autrui, à être vulnérable, authentique, spontané sans repasser derrière avec une examination méta-cognitive à la limite de l'obsession.Ou alors je suis tout simplement rouillé après plusieurs années sans écrire et il faut que je revienne aux exercices de base. Drabbles ?
C'est nostalgique les drabbles, les listes de prompt sur LiveJournal, les arbres d'écriture et autres soirées créatives. Mais tout ça, ça se faisait au sein de communautés qui sont vite devenues des béquilles, sans lesquelles je suis un peu perdu. Il faudra que je m'enseigne à le faire tout seul dans mon coin maintenant, à trouver mon propre élan sans recours à l'écho d'enthousiasme sur lequel j'avais coutume de rebondir.
La neige s'est transformée en pluie fine, ça rend l'atmosphère morne, maussade, pleine des gris et des bruns qui caractérisent si bien le mois de novembre. Je n'ai aucune idée de ce que je bois. C'est un sheng d'un certain âge, liqueur orange un peu trouble, saveurs fruitées et boisées avec une amertume bien nette, longue tenue en bouche. Probablement un produit du Lincang. Un truc dont je prévoyais d'en boire une certaine quantité assez quotidiennement car j'en ai prélevé une cinquantaine de grammes que j'ai mis dans un petit sachet plastique avec mes échantillons. Évidemment, ayant oublié de noter ce que c'était (ou alors le nom du machin était sur le plastique mais s'est effacé avec le temps), je ne peux pas confirmer.Cela dit si on joue un peu au détective, vu ce qui tournait dans mes théières en 2014... c'est soit les débris de la MuShuCha 2006, ou alors c'est une quantité prélevée de la grosse brique Qiao Mu Wang de 2013. Les deux pourraient faire sens. Je penche vers la MuShuCha, sans preuves. C'est probablement l'autre.
Ça fait du bien de déguster sans prise de tête, sans chercher à identifier ce que j'ai dans la tasse. Je me laisse surprendre par ce que le thé exprime d'infusion en infusion, j'en apprécie les subtilités au niveau où j'arrive à les percevoir, sur la langue uniquement, dans le corps, sans à-priori. Le jeu mental des références s'efface, son absence renvoie à l'essentiel.J'aimerais arriver à reproduire cet état d'esprit dans l'écriture.
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